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GemmeBarde Academy

le fameux concours annuel de ménestrels

lundi 22 novembre 2004, par Nak’hua Thorp

C’est dans un château près de Glargh que chaque année, Glaviot Fonny, ancien ménestrel dont la carrière musicale n’aura marqué personne et surtout pas moi, enferme pour quelques mois une douzaine de jeunes gens qui ont été infoutus d’entrer en apprentissage, mais qui veulent absolument embrasser la carrière de barde [1]. Ce qu’on préfère encore dans l’affaire, c’est qu’au bout de ces quelques mois, il n’en reste qu’un pour nous casser les oreilles. Et encore, pas longtemps.

Tous les ans, au printemps, une carriole fait le tour des principales villes de la terre de Fangh, afin d’auditionner les candidats. Ceux-ci ont en général déjà tenté de devenir l’élève d’un ménestrel confirmé, mais se sont fait fermer toutes les portes au nez [2] pour cause de manque de talent manifeste. La Barde Academy est pour eux la dernière chance de faire un jour quelque chose qui ressemble à de la musique. De très loin, quand même. De près, ça ressemble à... ça ne ressemble à rien, en fait.

On laisse aux sélectionnés le temps de faire les moissons ou les vendanges, et c’est vers la fin de l’été qu’ils se rendent au château, dont les hautes murailles interdisent toute communication entre l’intérieur et l’extérieur. C’est Glaviot Fonny lui-même qui, chaque matin, sort de l’enceinte pour raconter aux curieux les faits importants de la veille. Ce communiqué quotidien est très prisé des gens oisifs qui n’ont rien d’autre à faire de leurs journées que de se faire raconter celles des autres.

A l’intérieur, paraît-il, les apprentis bardes reçoivent des cours de chant, de danse et de théâtre. Curieusement, je n’ai jamais entendu dire qu’ils étudiaient la poésie, la composition ou la pratique d’un instrument. C’est pourtant ce qu’un barde enseigne généralement à ses élèves, la danse passant au rang du divertissement après la musique. Allez danser la gigue tout en jouant du clavecin, vous !

Une fois par semaine, Glaviot Fonny sort ses pensionnaires, leur fait prendre un peu l’air, et leur fait faire le tour des tavernes de Glargh. Les jeunes gens y démontrent leurs progrès en chantant des grands classiques que plus personne n’avait envie d’écouter. Mais la magie opère, et les clients ne fuient pas. Ils semblent au contraire très intéressés par la prestation des barde-académiciens.
Ce comportement peut sembler totalement contraire à l’instinct de survie qui prévaut chez la plupart des races dites "intelligentes" [3], mais une enquête m’a permis d’en trouver la raison. La Barde Academy est financée par de multiples mécènes, et c’est la clef du mystère. Le Donjon Facile offre sa tournée à la fin du récital, ce qui incite les gens à rester jusqu’au bout. De plus, des démonstratrices des boules de cire Chut distribuent des échantillons avant l’arrivée des pseudo-bardes, ce qui aide le public à résister.

Chaque semaine, à l’issue du récital, un des jeunes gens est "remercié". N’allez pas croire que le malheureux est renvoyé chez lui sans passer par la case départ et sans toucher deux cents pièces d’or. Glaviot Fonny est beaucoup plus humain que cela. En fait, il élève dans les caves du château un troupeau de cochons mutants, et l’élimination consiste à balancer le pire élève dans la fosse. C’est une façon d’inciter les autres à s’extirper au plus vite des abysses de nullité crasse où ils végètent. Et puis ça maintient une saine compétition entre les élèves. Mais bien entendu, ces choses-là ne sont pas dites au grand public, celui qui attend tous les matins devant le portail du château. Trop de bavardages risqueraient de tarir les vocations, et de mettre à mal la véritable mission de la Barde Academy.

Car quoi de plus sain que d’éliminer chaque année onze des douze pires musiciens de la terre de Fangh ? Le douzième, en général, comprend très bien le message. Officiellement, il est le gagnant d’un grand concours, mais il sait très bien qu’il n’est qu’un survivant. Alors il fait un récital ou deux, et puis on n’entend plus jamais parler de lui. Glaviot Fonny n’aura peut-être pas marqué l’histoire de la musique, mais en un sens, c’est un saint homme.

Peut-être un jour fêterons-nous la Saint Fonny, pour la plus grande joie de nos oreilles.

Nak’hua Thorp


[1Laquelle préfèrerait de loin embrasser le derrière d’un Golbarg.

[2Parfois au sens propre. Vous devriez voir la dentition de certains !

[3La définition est large, puisqu’elle englobe même les elfettes de niveau 1.