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GemmeOrdre errant des Talifurnes

anciennement "ordre secret des Talifurnes".

mardi 6 février 2007, par Nak’hua Thorp

Pendant des siècles, le nom de "Talifurne" résonna épisodiquement sous les voûtes des palais et des grandes écoles, sans qu’on sût très bien à quoi il renvoyait. On peut encore aujourd’hui trouver dans les bibliothèques des ouvrages tels que Le code Talifurne ou La malédiction des Talifurnes, qui se perdent en conjectures et présentent les Talifurnes comme les gardiens d’antiques secrets, prêts à tout pour les protéger [1]. Les plus raisonnables considéraient qu’il ne s’agissait que de légendes et de contes pour faire peur à la ménagère de moins de cinquante ans. Jusqu’à ce jour où l’ordre des Talifurnes fut enfin exposé au grand jour. Et comme bien souvent, il s’avéra que tout le monde s’était méchamment fourvoyé.

Première révélation : l’ordre des Talifurnes existe.

L’histoire remonte aux premiers graves dysfonctionnements de la tour de Minas T’irrite. Lorsque la nuée toxique provoquée par le dégazage de l’étuve à bière chaude détruisit la ville de Birtek située en contrebas, les villageois des alentours, venus aider la population locale à s’enfuir, eurent la surprise de voir s’extirper d’un souterrain une douzaine de types bizarrement accoutrés. A partir de cet instant précis, l’ordre secret des Talifurnes, qui se réunissait une fois par décade dans les catacombes de la cathédrale de Birtek, ne fut plus secret. Ils existaient bel et bien depuis des siècles, inconnus de tous ou presque, et même s’ils ne connaissaient pas les grands secrets du monde, ils avaient consigné un grand nombre de sorts rares dans leurs archives. La plupart des grimoires ayant été rongés par les gaz, seuls ceux ayant trait aux enchantements ont pu être sauvés. C’est pourquoi, aujourd’hui, les Talifurnes sont considérés comme des spécialistes de l’enchantement d’objets.

Deuxième révélation : l’ordre des Talifurnes est errant.

Le Grand Talifurne, chef bienheureux de ce joyeux ordre mystique, décida que puisque tout le monde savait maintenant qu’ils existaient, le seul moyen de préserver leur mission de conservation des sorts [2] était de faire en sorte que nul ne sache où ils étaient. A partir de la destruction de Birtek, l’ordre des Talifurnes devint un ordre errant. Vivant le plus clair de leur vie dans des chariots attelés d’ânes, les Talifurnes ne se posent pas plus de quelques jours dans un même endroit, le temps de recopier quelques sorts. Au début, c’étaient les sorts des archives perdues dont ils se souvenaient. Maintenant, le vrai but de leur errance est de reconstituer l’intégralité de leur travail d’antan. On dit que dans un premier temps, ils ont essayé de faire leur travail de copistes en route, mais qu’ils ont abandonné l’idée quelques nids-de-poule plus loin.

Troisième révélation : l’ordre des Talifurnes est ridicule.

L’habit du Talifurne n’a pas changé depuis plus de huit cents ans. Il est donc logique, finalement, qu’il soit quelque peu dépassé dans le monde actuel, déjà qu’il devait être bien clinquant à l’époque.
Un Talifurne porte donc une tunique noire sur laquelle il enfile une tunique plus courte, blanche, puis une troisième, dorée. Tous les ourlets de cette dernière tunique sont soulignés d’un galon aussi large que surchargé. La ceinture de velours rouge se passe trois fois autour du corps et se noue suivant un rituel précis dont, à ce jour, aucun Talifurne n’a osé donner les détails. Les babouches, dorées comme la tunique du dessus, sont visiblement d’inspiration orientale. La coiffe, enfin, est à peu près sobre, puisqu’il s’agit d’un simple bonnet blanc. Cependant, le Grand Talifurne porte un chapeau noir à très larges bords auquel pendent des breloques dorées.
Cependant, les règles de vie des Talifurnes leur imposent de ne porter aucun bijou, en signe d’humilité.

Gravure achetée sur un marché à Glargh

Quatrième révélation : l’ordre des Talifurnes est pauvre.

Leur mode de vie nomade ne leur permettant plus d’exercer comme autrefois un métier normal à Birtek, les Talifurnes tâchent de trouver des emplois saisonniers dans les villes où ils s’arrêtent. Le plus souvent, ils vivotent de la générosité des gens. L’éthique de leur ordre leur interdit de faire un usage commercial de leur connaissance de la magie [3], si bien qu’ils sont à moitié morts de faim la plupart du temps. C’est incroyable quand on connaît la richesse qu’ils pourraient tirer de quelques cours payants à l’école de magie du coin, ou même de la revente d’une partie de leurs costumes. Mais les Talifurnes tiennent à leurs traditions, qui sont tout ce qui leur reste, disent-ils. Ils considèrent la perte de leurs archives comme un châtiment qu’ils se seraient attiré en ne respectant pas assez les règles de l’ordre, et espèrent gagner à force d’abnégation le droit de retrouver leur crypte.
Sachant qu’à l’heure actuelle, il y a toujours des nuées toxiques à Birtek, on ne peut que leur souhaiter patience et longue vie.

Nak’hua Thorp


[1Un de mes préférés s’intitule Les Talifurnes et l’ésotérisme. A en croire l’auteur, Tholsadûm était Talifurne, Ilshidur était Talifurne, Patapon était Talifurne... J’ai trouvé le livre tellement drôle que j’ai loué les services d’un copiste pour en avoir un exemplaire dans ma bibliothèque personnelle.

[2Nul ne sait quel intérêt présente une mission sacrée consistant à consigner des sorts dont on craint qu’ils ne se perdent, si c’est pour les garder secrets par la suite.

[3Pour autant, elle ne leur interdit pas d’utiliser les sorts qu’ils connaissent. C’est pourquoi il existe un certain nombre d’objets enchantés par des Talifurnes. Mais l’enchantement est alors un remerciement, jamais un service monnayé.